Querelle Sartre-Camus en conférence à Prades le 13 novembre

L’intervention devant les lycéens pradéens, organisée par l’ALEC, s’est faite sous l’égide des Amitiés internationales André Malraux (AIAM) avec le soutien du conseil général. PHOTO/ J.-L.B
A l’invitation de l’Association pour la laïcité en Conflent (ALEC) et des Amitiés internationales André Malraux (AIAM)l’universitaire nîmois Jean-Louis Meunier est venu rencontrer des lycéens de Renouvier. Interview express.

C’est important, pour vous, d’être ici, à Prades, pour parler de Camus à des lycéens ?

C’est quelque chose que j’ai déjà fait au lycée Albert-Camus de Nîmes pour une dizaine de classes. C’est certes important d’en parler l’année du centenaire. Mais pour nous, aux Rencontres méditerranéennes, il est en tout cas aussi important d’en parler en 2014 et en 2015. Car l’œuvre de Camus nécessite d’être toujours mise en avant.

Que représente selon vous Camus en 2013 ?

Il représente quelqu’un qui nous aide à réfléchir dans des situations du monde. Qui nous apprend une forme de tolérance. C’est quelqu’un qui était très en avance sur son temps. Mais toujours dans le respect et la dignité de l’être humain. Tout n’est pas écrit dans Camus. Mais il nous donne des clés qui vont nous aider. Il avait coutume de dire “je parle et j’écris pour ceux qui ne peuvent pas, ne veulent pas ou ne savent pas parler”. Camus était quelqu’un de très ouvert sur l’autre.

Comment expliquez-vous le fait qu’il semble davantage intéresser les jeunes que Sartre à qui on l’a souvent opposé ?

La querelle Sartres-Camus, il faut vraiment qu’on finisse par en sortir. Sinon, ça va devenir sado-maso. Il faut vraiment arrêter cette chose-là. Je ne crache pas sur Sartre. Loin de là. J’ai personnellement été sartrien. Je garde encore une grande estime pour certains de ses textes. Je ne prends pas non plus la défense de Camus contre Sartre. Ils sont importants tous les deux. Ils ont eu c’est vrai des conflits. Surtout au moment de “l’Homme révolté”. C’était pour s’assurer une certaine prédominance à Saint-Germain-des-Prés. C’était politique aussi. Mais on ne va pas refaire l’histoire et les polémiques.

Est-ce que vous pensez qu’aujourd’hui Camus aurait eu la même capacité de révolte qu’il l’a pu l’avoir à l’époque ?

Ah ! Certainement. Enfin : il est mort. On ne peut évidemment pas parler à sa place. Mais quand on sait qu’il s’est engagé quel que soit le côté. Même contre ses amis. Il disait “je suis à gauche malgré moi”. A partir du moment où l’être humain était brimé, brisé, maltraité il s’engageait. Il l’a toujours fait. Je ne vois pas pourquoi il ne l’aurait pas fait aujourd’hui. C’est les autres qui vous obligent à vous engager. On ne reste pas neutre.

Est-ce que vous pensez qu’il manque vraiment dans le débat actuel ?

Oui. Indéniablement. Il manque parce qu’il n’est plus présent. Même s’il est encore énormément par ses écrits. C’est ca qui est intéressant chez Camus. Et nous passionne aux Rencontres méditerranéennes. Nous incite à poursuivre notre travail de recherche autour de sa personnalité et de son œuvre. Car il y a encore beaucoup d’aspects de Camus que l’on connaît moins bien que d’autres. C’est, dixit “au pied levé” que Jean-Louis Meunier a accepté de remplacer le grand spécialiste camusien Eugène Kouchkine qui devait initialement intervenir au lycée Renouvier. Malade, ce dernier a dû décliner l’invitation au dernier moment. Universitaire et féru de littérature française, Jean-Louis Meunier dirige les Rencontres méditerranéennes Albert Camus de Lourmarin.